Jean-Paul II béatifie un criminel contre l'humanité.
Le 10.10. 1982, canonisation de M. Kolbe (env.1900-env.1945; polonais), fondateur de revues catholiques antisémites. Voir l'ouvrage de H. Fabre présenté dans mes Notes de lectures.
Le 17.05. 1992, béatification de J.M. Escriva, fondateur de l'Opus Dei. La revue catholique Golias d'Août 91 (voir la bibliographie ) titre ainsi un article (page 231: "Pourquoi la béatification d'Escriva est grave"; sur l'Opus Dei, voir également le Monde Diplomatique de Septembre 1995 et Golias no 30: "Le monde secret de l'Opus Dei", été 1992 )
Le 1.10.1995, béatification collective de 64 prêtres réfractaires à la Constitution civile du clergé, exécutés à Rochefort en 1794. (Le Courrier Français, 6.10.1995).
Le 3.12. 1995, canonisation de E. Mazenod (1782-1861; français), militant pour l'école catholique, l'un des auteurs de la Loi Falloux; il soutint en 1851 le coup d'Etat de L.N. Bonaparte. (Note 53 du Réseau Voltaire du 22.1.1996).
Le 12.5. 1996: béatification de A. I. Schuster, cardinal, archevêque de Milan de 1929 à 1954, qui avait soutenu Mussolini en 1935 dans sa guerre coloniale en Ethiopie (voir le livre de A. Lacroix-Riz sur Schuster). (Note 69 du Réseau Voltaire du 14.5.1996).
En Juin 1996: béatification de deux prêtres morts pour s'être opposés au nazisme. Pour J. Grunwald, de l'association des catholiques critiques de Berlin, "elle sert seulement à cacher qu'une majorité de l'église a collaboré avec le nazisme." (Sud-Ouest, 26.6. 1996; voir aussi Golias numéro 47, mai 1996 qui développe cette thèse).
Automne 1996: béatification de C. Jarrige (1754-1836), religieuse française qui a soutenu les prêtres réfractaires dans leur lutte contre la Révolution Française (Note 96 du Réseau Voltaire, décembre 1996; participation du gouvernement français à la cérémonie!)
Octobre 1998: béatification prévue du cardinal croate A. Stepinac, collaborateur de crimes contre l'humanité. Voir ci-dessous.
Les amis de Jean-Paul II
Le 11.12.1991, Jean-Paul II accordait sa bénédiction apostolique à l'ancien nazi belge Léon Degrelle. (Voir le Bulletin de l' Union des Athées d'avril 1995 qui reproduit la photo d'un document du Vatican à ce sujet.)
Le 18.2.1993, Jean-Paul II adressait au général Pinochet un message de félicitation à l'occasion de ses noces d'or accompagné de sa bénédiction apostolique. (Golias no 33, printemps 1993). En novembre 1998, il cherche à faire libérer Pinochet.
"Le Saint-Siège a reconnu hier avoir conduit, en novembre, une "démarche diplomatique" à la demande du gouvernement chilien, quelques semaines après l'arrestation à Londres de l'ex-dictateur Augusto Pinochet. Le Vatican a refusé de révéler la teneur de sa représentation, mais a indiqué qu'elle n'émanait pas du pape lui-même [Lâche et faux-cul!].
Selon les défenseurs britanniques de Pinochet, qui ont fait état jeudi de la démarche du Saint-Siège, le pape aurait souhaité que le dictateur puisse retourner au Chili sur des bases humanitaires (sic!) et avec le souci que ne soit pas mis en danger la réconciliation nationale.
Les opposants au dictateur rappellent que Pinochet a fait tuer au moins cinq prêtres et
poursuivre des milliers de chrétiens qui s'opposaient à la junte [quant aux syndicalistes, ils s'en moquent!]. "Nous sommes choqués que le pape soutienne Pinochet, a indiqué hier un porte-parole, alors que, dans une homélie, la semaine dernière il demandait que soient jugés les
responsables de génocides et de crimes contre l'humanité."
Libération, 20/21 février 1999.
Quatre mois d'intercession du Vatican en faveur de Pinochet.
"La lettre envoyée début janvier par le cardinal Sodano, secrétaire d'Etat au Vatican, à R. Cook, ministre des Affaires étrangères britannique, a fait apparaître au grand jour un processus de
médiation en faveur de Pinochet qui commença dès l'éclatement de "l'affaire".
La première démarche significative a eu lieu le 1er novembre 1998, dans la résidence d'été du Pape, soit quinze jours après l'arrestation d'A. Pinochet à Londres. [...]
Dans le dispositif politique favorable à Pinochet, l'Opus Dei (O.D.) occupe un poids tout aussi décisif que le cardinal Sodano et le cardinal Medina. Le quotidien espagnol El Pais a révélé qu'à la Villa Tevere, siège de l'O.D. à Rome, se sont tenues plusieurs réunions concernant la stratégie à adopter dans l'affaire Pinochet. Par ailleurs, à Londres, la prélature personnelle de Jean-Paul II [l'O.D.] travaille avec la puissante Fondation Thatcher. Le coordinateur des différentes actions de sauvetage de l'ancien dictateur, l'avocat F. Barros est ainsi un militant de l'O.D. Plusieurs membres britanniques de cette organisation ultra-conservatrice sont aussi liées à la défense de
Pinochet par l'intermédiaire de l'association des "Amis chiliens d'Outre-mer", où le banquier Ch. Alexander pèse de tout son poids. Des millions de livres sterling ont, entre autres, été investis dans une opération de communication visant à redresser dans l'opinion publique britannique l'image de l'ex-dictateur chilien. Témoignage Chrétien, 11 mars 1999.
La diplomatie souterraine du Vatican ne semble pas être approuvée par tout le monde dans l'église catholique.
Mgr. Noyer (Amiens): "Concernant Pinochet, il est impensable de demander une quelconque
indulgence." Mgr. Vilnet (Lille): "Une forte mobilisation de l'opinion publique pourrait permettre de clarifier la position du Vatican." Mgr.Lagoutte (s'exprimant a titre personnel ):
"Il n'y a pas de réconciliation sans aveu. Et il ne semble pas que Pinochet soit prêt à avouer. Il faut qu'il reconnaisse sa propre responsabilité..." (Témoignage Chrétien, 25 mars 1999)
Que Pinochet reconnaisse ou non sa responsabilité ne change rien. Quelle que soit l'étendue de sa repentance, il ne mérite que le poteau d'exécution sans le moindre pardon.
Dans Golias no 63, novembre 1998, on peut lire un bilan édifiant des relations du Vatican avec les dictateurs sud-américains:
Mgr Francisco Javier Errazuriz, archevêque de Santiago du Chili a déclaré, selon La Vie que "les arrestations de Pinochet étaient moins choquantes que son arrestation à Londres".
Mgr. Sodano, était nonce au Chili quand Pinochet régnait en maître et il entretenait avec lui d'excellentes relations, au point de lui envoyer, bien après la fin de la dictature une lettre de félicitations pour l'anniversaire de son mariage (cf ci-dessus). A son départ du Chili, il reçut au cours d'un repas offert par Pinochet la "Grand-Croix de l'ordre du mérite" du Chili. Il est aujourd'hui le deuxième personnage du Vatican, secrétaire d'Etat.
Mgr. Medina, futur archevêque de Valparaiso un fervent pinochetiste, inconditionnel jusqu'à la complicité, a toujours été un adversaire zélé de la théologie de la libération. Par exemple:
"La démocratie ne signifie pas automatiquement que Dieu veuille qu'elle soit mise en pratique" (La Segunda du 3 août 1990). Il est aujourd'hui au Vatican Préfet de la Congrégation pour le
culte divin et les sacrements.
Mgr. Lopez Trujillo, un colombien, fut, lui aussi, de tout temps un adversaire déterminé de la théologie de la libération et de tous les combats pour la démocratie. Pendant les périodes troublées en Amérique latine, il marcha main dans la main avec la CIA. Il est aujourd'hui au Vatican président du Conseil pontifical pour la famille.
Mgr. Moreira Noves, brésilien, fut rapatrié d'urgence au Vatican par Paul VI, au temps où sa complicité avec la dictature brésilienne l'avait fait honnir du peuple. Il est aujourd'hui le nouveau patron de la Congrégation des évêques.
Mgr. Pio Laghi, italien, se mouilla jusqu'au cou avec la dictature argentine lorsqu'il était nonce à Buenos Aires. Le collectif des "mères de la Place de Mai" a déposé contre lui une plainte devant la justice italienne. Il est aujourd'hui responsable de la Congrégation pour l'éducation catholique.
A. Pinochet reste pour eux le modèle du chef d'Etat, pour son sens de l'"ordre social" et de l'"ordre moral", pour son culte de l'obéissance imposée au peuple, pour sa haine de la démocratie, pour son amour d'une église collaboratrice. (article de Jean Molard).
Tout cela fera de belles repentances pour les prochaines années!
A. Stepinac
Le pape Jean Paul II prévoit d'effectuer un voyage en Croatie en octobre 1998 et à cette occasion de prononcer la béatification du cardinal croate A. Stepinac.
Des livres de H. Fabre et A. Lacroix-Riz analysés ailleurs, j'extrais les faits suivants.
Nommé archevêque de Zagreb en 1934 et président de la conférence épiscopale en 1937, A. Stepinac agit en activiste prohitlérien profondément hostile aux Serbes. Un état croate indépendant de la Serbie, de la Bosnie et de la Slovénie est créé en 1941 par Hitler et Mussolini, avec l'appui du Vatican. Cet état est dirigé par le fasciste Ante Pavelic, condamné à mort en France pour l'organisation d'un attentat terroriste à Marseille en 1934 qui a coûté la vie à Alexandre de Yougoslavie et au ministre français Louis Barthou. Son objectif est d'éliminer la minorité serbe orthodoxe. L'état croate adopte des lois antisémites et antiserbes destinées à "protéger le sang aryen". Il met en oeuvre un programme de conversions forcées au catholicisme, avec tortures et exécutions de ceux qui refusent de se convertir. De nombreux fransiscains participent à ces massacres (600 000 victimes).
Le plus haut dignitaire de l'église croate est alors A. Stepinac qui fait aussi partie du Parlement oustachi. Ses parades aux côtés des fascistes sont fréquentes. (Le livre de H. Fabre reproduit plusieurs photos. Voir ci-dessous).
Les deux livres cités mentionnent à "l'actif" de Stepinac les interventions suivantes:
messages de solidarité avec le gouvernement de Pavelic et de louange de son action (en particulier dans des rapports destinés au Vatican en 1942 et en 1943);
quelques interventions molles en faveur des juifs convertis (mais rien pour les autres);
quelques critiques sur la manière inefficace dont sont effectuées les conversions forcées, mais aucune condamnation de leur principe;
demandes de récupération pour l'église catholique de biens confisqués aux orthodoxes.
Le Vatican a constamment soutenu le régime croate et aidé ensuite à l'"exfiltration des oustachis" (Voir le livre de Aarons et Loftus).
En septembre 1946, Stepinac est arrêté (Tito est alors au pouvoir) et condamné à 16 ans de travaux forcés. Il est libéré en 1951. C'est ce qui lui vaut d'être béatifié comme "martyr du communisme". En 1953 il se voit recompensé du titre de cardinal par Pie XII.
Il me semble que si Stepinac était vivant, il pourrait être inculpé de collaboration à des crimes contre l'humanité. Il avait beaucoup plus de pouvoir et donc de responsabilités que M. Papon. La béatification de Stepinac faisant suite à celle du cardinal Schuster en mai 1996 qui soutint Mussolini dans les années 30, montre clairement l'hypocrisie des déclarations de repentance de l'église catholique.
Les photos ci-dessous sont tirées de l'ouvrage cité de H. Fabre, avec les légendes complètes.
En 1942, A. Stepinac prononce une allocution. A sa gauche, un général allemand, à sa droite deux personnages qui seront pendus après la guerre: le Gauleiter Von Kasche et le ministre oustachi Mile Budak. (source: H. Laurière, Assassins au nom de Dieu, Ed. de la Vigie, 1951).
Pavelic et Stepinac se rendent à la messe célébrée à l'occasion de l'ouverture du parlement croate. (Ahriman Verlag.)
A l'occasion du 4ième anniversaire de l'Etat indépendant de Croatie, Mgr Stepinac serre la main de Pavelic. (Ahriman Verlag)
Plus que jamais il faut "écraser l'infâme."
Annexe: Au Vatican, la "machine à fabriquer des saints" devient un instrument éminemment politique.
La durée moyenne d'un procès est d'une cinquantaine d'années, mais il y a de fortes disparités. Prenez Nicolas Barré, béatifié 313 longues années après sa mort : sa cause a été introduite en 1930, transmise à Rome en 1976 et il a fallu attendre 1989 pour lui trouver une guérison providentielle. A l'inverse, mère Teresa, disparue voici dix-huit mois, pourrait bien être béatifiée en un temps record, peut-être dès l'an prochain. (On avait même parlé de Pie XII. Mais le Vatican a du y renoncer, sous la pression de la communauté juive.)
Au-delà des rigueurs de la procédure, les sanctifications sont devenues sous Jean-Paul II un instrument éminemment politique. De plus en plus, au Vatican, la "machine à fabriquer des saints" devient affaire de stratégie ou de diplomatie. elle sert à envoyer des signes, à infléchir des équilibres, à donner des gages aux différentes tendances cohabitant au sein de l'Eglise. La béatification du laïc F. Ozanam, lors des JMJ en 1997, avait ainsi été interprétée comme une faveur aux catholiques "progressistes". Plus récemment, celle du cardinal croate Stepinac et la canonisaton d'Edith Stein, carmélite juive "apostate" morte à Auschwitz, avaient été comprises comme des messages d'appui aux milieux les plus conservateurs de l'Eglise...(Journal du dimanche, 7 mars 1999).
Jean-Paul II rallume la guerre d'Espagne.
Champion de la béatification, Jean-Paul II suscite l'admiration béate de quelques faiseurs d'opinion de réputation laïque. L'hommage qu'il a rendu aux prêtres espagnols fusillés en 1936 pendant la guerre civile n'a donc pas soulevé de polémiques. Mais on fera difficilement passer
les curés espagnols de cette époque pour des saints et moins encore pour les victimes d'un régime communiste. Les prêtres chers à Jean-Paul II furent, quant à eux, les piliers de la dictature de Primo de Rivera, ils ont béni la création de la Phalange par son fils Jose Antonio, avant d'appuyer la sédition du général Franco.
L'Eglise espagnole a condamné à mort le premier régime de liberté que l'Espagne ait connu. elle ne voulait pas d'une république laïque qui mettait en cause son pouvoir et surtout sa tradition, celle de la sainte Inquisition. Sans le secours du clergé, les généraux félons n'auraient pu déclencher une guerre civile qui fit un million de morts.
[ ...] le geste du pape visait moins les prêtres eux-mêmes que l'Histoire, qu'il n'a de cesse d'écrire à sa manière. Voici donc, par ses martyrs béatifiés, l'Eglise d'Espagne transformée en victime d'une guerre qu'elle tenait pour Sainte! (L'Evenement, 11 mars 1999).
Au programme des repentances de l'an 3000 (si le Vatican existe toujours):
L'exfiltration des prêtres rwandais.
L'Eglise catholique est impliquée dans une opération de protection de prêtres rwandais soupçonnés de crimes commis il y a cinq ans. C'est ce qu'affirme la revue catholique (?)
Golias, dont les révélations sont publiées aujourd'hui. Une enquête de 30 pages démontre l'existence d'un vaste réseau depuis Kigali via Rome et Paris, et differents diocèses belges, français et italiens, dans lesquels une soixantaine de prêtres ont été exfiltrés.
Interview de Christian Terras, directeur de Golias:
Q. Comment en êtes-vous arrivé à mettre en cause le rôle de l'Eglise, et notamment de l'Eglise de France, dans le génocide du Rwanda?
R. Depuis cinq ans, nous avons consacré deux numéros au Rwanda et gagné deux procès contre le père Wenceslas, qui nous accusait de violation du secret de l'instruction. C'est l'épiscopat francais qui a assuré sa défense en finançant des conseils à hauteur de 400 000 francs!
Nous ne disons pas que l'Eglise est directement responsable, mais nous avons des preuves de la participation du clergé rwandais au génocide, de l'aide de certains pères blancs et de l'attitude de l'Eglise qui fait aujourd'hui du négationnisme inspiré par l'idéologie ethniciste des Pères Blancs. Quant a l'épiscopat français, il réagit en suivant les ordres de Rome, par esprit de caste, par naîveté aussi.
Q. En fait, le coeur de ce que vous décrivez comme un réseau d'exfiltration est à Rome.
R. Oui, notamment à travers la Congrégation pour l'évangélisation des peuples, sorte de ministère des Missions où de nombreux responsables sont des Pères Blancs. Cette structure richissime dirigée par le cardinal Tomko a organisé l'accueil et l'obtention de bourses d'études
pour de nombreux prêtres rwandais. Mais l'ONG Caritas a eu aussi un rôle déterminant. (Libération, 2.4.1999)